• Fintech : la mutation express du système bancaire

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    Les acteurs traditionnels du système bancaire ont été bousculés dans leur cœur de métier. L’apparition du « bankless banking » est une révolution encore inachevée permise par la quête insatiable des données personnelles. Comment les fintechs ont-elles bouleversé ce secteur si puissant et quels seront les leaders bancaires de demain ?

    En évoquant la « transformation par la fintech », nous évoquons principalement quatre types d’acteurs :
    - Les fintechs B2C (applications smartphone de gestion des finances ou de création de cagnottes en ligne)
    - Les fintechs de crowdfunding, destinées à la création de projets
    - Les fintechs B2B qui s’adressent aux PME-TPE pour leur proposer des offres de financements en dehors du circuit bancaire
    - Les insurtechs qui opèrent dans le secteur des assurances.
    Leur ascension fut si rapide qu’il suffit de remonter seulement 5 ans en arrière, soit en 2015, pour voir à quel moment le monde a pris conscience du potentiel “fintech”. A ce moment-là, on assiste en effet à une ébullition, et le crowdfunding explose. Alors qu’en 2008, les investissements mondiaux dans les fintechs étaient de $930 millions, en 2015 ils atteignent $12 milliards, selon les données d’Accenture. On recense alors 1362 fintechs dans le monde fin 2015.
    Il existe bien sur de nombreuses raisons qui poussent les investisseurs Ă  soutenir ou Ă  se lancer dans la fintech, parmi lesquelles :
    - L’identification d’un marché au fort potentiel à cause de la rigidité des grands groupes
    - La démocratisation du paiement en ligne et la forte croissance des transactions
    - La valorisation des données personnelles et du Big Data dont la fintech souhaite tirer profit
    - La création de fintechs se stabilise peu à peu vers 2016 et leur objectif devient la rentabilité. Celles qui sont parvenues à se financer survivent, les fintechs B2B sont plus nombreuses que les fintechs B2C. 2018 semble marquer un palier dans la croissance des fintechs, année pendant laquelle KPMG estime les investissements dans la fintech à $110 milliards.
    Mais la fintech n’est pas seulement constituée d’acteurs nouveaux. Au contraire, de puissants groupes ont saisi la mesure de l’enjeu et investissent dans cette finance dernier cri. Les GAFA, les 3 géants chinois Tencent, Baidu et Alibaba ont su s’implanter sur un marché qui n’est pas leur marché d’origine. Parmi les services financiers les plus connus proposés par ces géants du numérique on retrouve les paiements mobiles d’Apple, de Google, d’Android, et de WeChat, l’option groupe Payment de Facebook, les solutions de prêts aux entreprises Amazon lending et bien d’autres encore.

    Quelle stratégie pour les banques traditionnelles ?
    Les banques traditionnelles sont en difficulté face à la transformation numérique de la finance et des transactions. Les néo banques (Revolut, N26, Monese…) ont centralisé une grande partie des flux bancaires. On compte 2,53 millions d’utilisateurs de ces néo banques en France en novembre 2019 et 7,2 millions au Royaume-Uni. Pour essayer de survivre, les grands groupes ont compris qu’il leur était indispensable de collaborer avec ces nouveaux entrants. Ces dernières années, les collaborations se sont véritablement démocratisées, comme nous avons pu le constater lors du Paris Fintech Forum 2020, lors duquel de nombreuses annonces de partenariats ont eu lieu (cf notre article sur le sujet, lien en bas de page). On estimait en 2018 que 75% des fintechs cherchaient à s’associer avec des acteurs traditionnels de la finance. Pour beaucoup, la collaboration fintech / grand groupes est une source de croissance pour les fintechs et une condition de survie pour les grands groupes qui peinent à innover.

    « Banking is necessary, banks are not » disait déjà Bill Gates en 1994. Cela ressemble à l’obsolescence programmée des banques traditionnelles sans innovation. Si elles veulent être en mesure de rivaliser avec la nouvelle concurrence, les banques doivent devenir « des entreprises technologiques » d’après les termes employés par Svetlana Baranov. Le titre de son livre est on ne peut plus évocateur : « Bankless Banking : de nouvelles fondations pour la banque » (2018). Selon elle, pour devenir des entreprises technologiques, les banques ont l’obligation de recourir à l’open banking.

    Autrement dit, elles doivent s’ouvrir à d’autres acteurs du secteur, voire des concurrents, comme les fintechs et les GAFA, en passant par les API (Application Programming Interface). Depuis septembre 2019, elles doivent en effet fournir à des acteurs tiers, comme les agrégateurs de comptes ou les services de paiement, un accès sécurisé aux données de leurs clients, avec l'accord de ces derniers.

    Si l’accès aux données permis par les API est une aubaine pour les fintechs, les banques traditionnelles peuvent aussi bien en tirer profit. Elles vont étendre leurs fonctions en développant des activités hors cœur business. Leur mission est de développer des services complémentaires pour fidéliser leurs clients. Cibler le client devient plus facile car ses données sont accessibles. L’un des enjeux est d’être l’interface la plus simple d’utilisation et multi-tâche pour rester au cœur de l’écosystème bancaire.

    Cependant, des freins à s’engager dans cette transformation technologique subsistent toujours au sein des grandes institutions. Un changement de stratégie nécessite une forte mobilisation et une réorganisation de toute l’entreprise. C’est d’abord un fort ralentissement, d’autant plus important que les banques fonctionnent majoritairement par objectifs courts termes et propres à chaque Business Unit. "Notre plus grand ennemi, c'est nous-mêmes", reconnaît Alain Pierre Fischer, chief digital officer de la banque de financement et d'investissement de la Société Générale. Selon lui, les banques doivent à présent aller vers le "cross-silos", et donc décloisonner leurs activités, au risque sinon de perdre le segment de la relation client au bénéfice de nouveaux acteurs.

    A présent, il faut donc que les banques trouvent le moyen de rompre avec la rigidité de leur organisation pour prendre ce virage technologique et salvateur.


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