• Sauver les startups

  • Card image cap

    L’Etat a annoncé mettre 4 milliards d’euros sur la table afin de sauver les startups, un écosystème lent à la construction qu’il faut préserver. « Une biotech peut mettre 10 ans de recherche à sortir son produit, sans réaliser de chiffre d’affaires, et si on détruit ce tissu au coeur de notre stratégie, de la compétitivité et de la souveraineté française, le risque est qu’on mette des années à le reconstituer » , a justifié Cédric O par téléphone. “On ne peut pas se permettre de les laisser tomber dans la période actuelle.”


    Nicolas Brien, PDG de France Digitale, partage Ă©videmment cet avis. Il se dit inquiet pour les jeunes startups. « 95% des startups membres de France Digitale demandent un dispositif de chĂ´mage partiel » affirme-t-il en ajoutant que « les startups qui ont passĂ© la sĂ©rie A auront besoin de changer de paradigme plus centrĂ© sur l’EBITDA et la profitabilitĂ© mais nous sommes surtout inquiets pour les startups en amorçage et en prĂ©-amorçage. Ca va ĂŞtre beaucoup plus compliquĂ© pour elles car  le recours aux VC ou des business angels est plus difficile. On demande au gouvernement de renforcer ses mesures avec une action forte Ă  destination des BA ».



    Si cette aide de l’Etat devrait préserver l’écosystème des startups, une question émerge alors : comment seront distribués les 4 milliards ?


    L’argent sera utilisé par des versements anticipés d’un certain nombre d’aides ou de crédit d’impôt, ce qui représente 1,5 milliard de d’euros. Les prêts de trésorerie garantis par l’Etat en fonction de la masse salariale ou du chiffre d’affaire annuels, annoncés par Bruno Le Maire, pourront représenter jusqu’à 2 milliards d’euros pour les startups

    Le gouvernement prévoit également d’autres mesures comme le versement anticipé des aides à l’innovation du Programme d’investissement d’avenir pour un montant total estimé de 250 millions d’euros. Il prévoit également une enveloppe spécifique de 80 millions d’euros gérée par Bpifrance à destination des startups qui ne peuvent pas lever des fonds pendant cette période. Par ailleurs, l’État maintient, à travers Bpifrance, son soutien aux entreprises innovantes, comme les années précédentes. Celles-ci devraient recevoir ainsi près d’1,3 milliard d’euros d’aides à l’innovation en 2020 sous forme subventions, avances remboursables, prêts, etc... selon un communiqué du gouvernement.


    Depuis cette annonce, le secrétaire d'Etat en charge du numérique témoigne de l'importance accordée par le gouvernement à cet écosystème et à ses spécificités. Il explique comment la feuille de route devrait évoluer dans le courant des prochains jours et des prochaines semaines.


    Extraits de son interview recueilli par Guillaume Bregeras pour Les Echos :

    Les 4 milliards d'euros dédiés aux start-up sont un soutien inédit dans le monde depuis le début de la crise, pourquoi avoir choisi de frapper aussi fort ?


    Cela peut paraître ésotérique de parler start-up lorsque l'attention se concentre sur le système de santé, mais c'est indispensable. Si nous voulons continuer à créer des emplois, à assurer notre souveraineté technologique, nous devons impérativement soutenir nos start-up. Une partie d'entre-elles apportent du reste une réponse concrète aux différents aspects de la crise, que ce soient les biotechs sur le plan de la médecine ou les outils de télémédecine pour décharger le système de santé, par exemple. J'ajoute enfin que les fonds mobilisés ne le sont évidemment pas au détriment d'autres sujets. C'est l'ensemble de l'économie qui fait l'objet d'un soutien massif du gouvernement.



    Combien de temps vont pouvoir tenir les entreprises bénéficiaires de ces mesures ?


    Mon sentiment est que l'écosystème devrait globalement résister à une crise sanitaire et économique qui dure moins de six mois. Dans ce scénario, il y aura des conséquences bien entendu, mais cela aura surtout pour effet de décaler la croissance de l'écosystème en limitant ses pertes. Si la situation devait évoluer, nous adapterions notre réponse mais, à ce stade, la priorité est de faire que la mise en oeuvre soit à la hauteur des annonces. Le secteur privé du financement a aussi son rôle à jouer en recapitalisant les start-up qui en ont besoin, notamment dans les secteurs les plus touchés comme le tourisme.



    Envisagez-vous un scénario moins optimiste qui pourrait modifier le modèle de croissance des start-up ?


    L'incertitude sur la profondeur et la durée de la crise est trop forte pour se projeter pour le moment au-delà de la période actuelle. Il est donc trop tôt pour évaluer la manière dont cela va changer les comportements des investisseurs dans la durée. On peut toutefois raisonnablement estimer que peu de choses changeront si la crise sanitaire se termine avant l'été. Dans le cas contraire, cela aura certainement des effets mais ceux-ci sont difficiles à évaluer aujourd'hui.



    Quels sont les secteurs où les jeunes pousses pourraient tirer leur épingle du jeu durant cette période ?


    Il y a évidemment le domaine de la santé, mais aussi celui qui produit des solutions liées au télétravail, ou celles qui apportent un soutien technique aux entreprises par exemple. Mais il ne faut pas sous-estimer l'impact du confinement actuel sur les secteurs qui pourraient tirer un avantage de cette période. Prenez l'exemple du e-commerce, ses acteurs enregistrent des hausses de commandes, mais ils se retrouvent confrontés à des difficultés opérationnelles et de livraison qui les empêchent d'en tirer parti.